Sinopse
J’aimais beaucoup Tap, mais d’une affection tyrannique et quelque peu autoritaire. Le bon chien le savait sans doute, car il me suivait comme mon ombre, et, quand je m’arrêtais, se couchait à mes pieds sans me quitter des yeux.
Mais aujourd’hui Tap était infidèle... Et sa peu patiente jeune maîtresse en ressentait une véritable colère.
À travers le feuillage des châtaigniers, le soleil se glissait et s’épandait sur le sol herbeux en longues coulées lumineuses. À mesure que j’avançais, le sentier s’élargissait, les arbres se clairsemaient, l’herbe que foulaient mes vieux souliers attachés par des lacets verdis se faisait plus drue.
Et, tout à coup, apparut la Luzette. Elle coulait très paisible, entre deux rives gazonnées. Un peu plus haut, elle était un petit torrent, elle le redevenait à quelque cent mètres en aval ; mais ici, elle se donnait le plaisir du repos, en reflétant dans ses eaux claires les beaux châtaigniers qui se dressaient sur ses bords.
D’un mouvement souple, je me laissai glisser à terre et m’étendis de tout mon long, les coudes dans l’herbe, les mains sous le menton. C’était ma position favorite lorsque je me trouvais en présence de la Luzette – mon amie la Luzette !
Quand Tap était là, il s’étendait près de moi, et, le nez entre les pattes, semblait contempler, lui aussi, l’onde paisible à peine agitée parfois d’un léger remous. Pour la jeune créature ignorante et imaginative que j’étais, les animaux, les plantes, les éléments eux-mêmes étaient doués d’une âme, et je me figurais que Tap, comme moi, cherchait le secret caché sous le calme mystère de ces eaux vertes, d’un vert pâle et transparent, qui se faisait à certaines heures lumineux, tandis qu’à d’autres je le voyais sombre, semblant refléter quelque inquiète et sourde tristesse.